Du storyboard à l'image
Le mois dernier, je suis allé tourner 3 petites pubs au Luxembourg. Il s'agissait de 3 "pastilles" de 7 secondes, destinées à être diffusées avant la météo, sur la chaine nationale, RTL TV.
J'étais ravi d'y aller.
Déjà, je suis toujours ravi de faire de la pub.
Et je le suis encore plus lorsque je voyage (on m'a parlé hier d'une pub à tourner bientôt en Ukraine, croisez les doigts pour moi).
Le tournage au Luxembourg s'est super bien passé. Une fois n'est pas coutume, la prod était super cool, l'agence aussi. Ils étaient à la fois impliqués et pas trop dirigistes sur le tournage, ce qui s'est révélé très agréable. L'équipe technique était composée de locaux avec lesquels je me suis parfaitement entendu. Je serais bien content de retravailler avec tous ces gens là.
Durant la prépa, j'avais quelques doutes quant au découpage des films. En effet, je n'avais pas pu me rendre sur les différents lieux de tournage en amont, et les storyboards que j'ai reçus avaient été conçus avant les repérages. Ils étaient donc "théoriques", et ne tenaient pas compte des lieux finalement retenus.
A titre d'exemple, je vais vous montrer l'un des storyboards que j'ai reçu.
En l'état, c'est plutôt difficile à réaliser.
Le plan sur le pouce, puis le plan sur le visage, le plan sur tous les pouces, etc... j'avais peur que ça ne rende pas super bien à l'image.
Je me suis donc retrouvé obligé de repenser le découpage juste avant de tourner. C'est une situation asez inconfortable, où l'on a le sentiment de "marcher sur un fil".
Sans filet.
Tout le monde attend que le réalisateur prenne une décision.
Paye ta pression.
A mes débuts, j'avais tendance à donner des instructions rapidement (pour ne pas donner l'impression d'hésiter), quitte à tout changer après.
Aujourd'hui, je m'autorise la réflexion, même si ça doit prendre un peu de temps. Et je n'ai pas honte de consulter mon chef op' lorsque je sèche sur un cadre ou un enchainement de plans.
Après tout, on est là pour faire le meilleur boulot possible.
Pas pour passer pour un réalisateur génial et infaillible (même si ça m'arrangerait bien que tous mes clients me prennent pour un génie. Vaste entreprise...)
Bref.
On était dans un grand bureau de type open space. A mon grand désarroi, moi qui ai toujours préféré travailler avec des jolies filles plutôt qu'avec des jolis garçons, la jeune femme du storyboard avait été remplacée par un jeune homme, très sympathique au demeurant.
Je me suis dit : "OK, qu'est ce qu'il se passe dans l'espace ?"
On a un open space, des ordinateurs. Des figurants vont "travailler" dessus. On ne peut pas commencer par le pouce levé, on ne comprendrait pas d'où il sort. Il faut donc commencer par faire arriver le jeune homme dans l'open space afin qu'il attire l'attention de ses collègues. Ensuite, le pouce. puis la réaction.
Sur un 7 secondes, la clé est d'aller à l'essentiel. Chaque plan doit raconter quelque chose de précis, sinon on va se retrouver battus au montage.
Et croyez moi, il y a peu de sensations plus frustrantes que celle de se retrouver battu au montage.
pulsions d'auto-flagellation.
Avec Serge Benassutti, le chef op', on a passé en revue tous les plans à shooter :
1 - l'entrée
2 - capter l'attention
3 - Le pouce
4 - la réaction
4 plans. Soit un peu plus d'1.5 seconde par plan, ce qui est un peu long, dans l'optique d'un montage très cut. On a donc ajouté un plan "bonus" où les pieds du personnage principal s'arrêtent.
Voilà le résultat quasi def, pré-étalonné, packshot et musique non définitifs :
(Attention, c'est très court)
Au final, le spot n'a plus qu'un lien de parenté éloigné avec le storyboard. Je trouve qu'il fonctionne pas trop mal sur l'idée d'origine, et le client est satisfait, c'est le principal.
J'ai eu un peu plus de difficultés à improviser le découpage d'un 2e spot dans une salle de bains quelque peu exigüe. je vous en reparle prochainement...