Montage, masochisme et réflexions
Depuis une dizaine de jours, je travaille d’arrache-pied sur le montage de ma dernière réalisation.
Ça avance, ça avance…
Certes…
Mais dans quelle direction ?
Plus je monte, plus je m’interroge.
« Est-ce que c’est bien ? »
« Est-ce que le rythme est bon ? »
« Est-ce que Monsieur Poulpe est à son avantage ? »
« Est- ce que c’est clair ? »
La question perfide arrive juste après : « Est-ce que ça pourrait être mieux ? ».
Le truc angoissant avec le montage, c’est que parfois, ça avance tellement bien et tellement vite que paradoxalement, on finit par se persuader qu’il ne peut pas en être ainsi.
Qu’il est impossible de traverser la phase de montage comme on traverserait la Floride en somnolant affalé à l'arrière d'un bus climatisé.
Il faut se réveiller.
Se poser des questions.
Remettre en cause le choix et la durée de chaque plan.
Chaque « cut ».
Réfléchir.
Réfléchir davantage.
Se battre contre quelques plantages intempestifs du logiciel de montage.
Etre victime d’insomnies.
Laisser des messages sur son propre répondeur téléphonique pour se souvenir d’une idée lumineuse.
En rêver la nuit.
Voilà ce qui m’arrive en ce moment.
J’ai un montage quasi-finalisé, mais je ne suis pas satisfait.
J’ai la sensation de ne pas m’être suffisamment cassé le c*** pour être satisfait.
Comme si la quête d’amélioration (la perfection est sans doute d'un autre monde…) était liée à une forme de masochisme conscient, sans lequel il serait impossible de trouver bonne conscience.
Alors oui, on peut soulever la question du rapport au travail et de l’héritage culturel : Dans nos sociétés, seul le travail dur, pénible est valorisé.
Un travail facile est souvent suspect.
Souvenez-vous de votre scolarité, et des leçons apprises par cœur, laborieusement pour la majorité d’entre nous.
Rappelez vous le collègue de boulot qui annonce fièrement : "Pfff, j'ai encore travaillé tout le week end".
La pénibilité rassure.
Elle conforte dans l’idée que dans la vie, rien n’est facile.
Tout se mérite.
Héritage culturel et bon sens collectif.
Pour en revenir à nos moutons-montages, la vérité doit se situer quelque part entre ce qui vient d’être énoncé, et un constat à la fois simple, objectif et sans appel :
« Peut mieux faire ».
Voilà ce que je me dis en visionnant mon montage.
Il y a forcément des améliorations à trouver.
Et lorsque je les aurai trouvées (car je les trouverai. In myself I trust), il ne me restera plus qu’à terminer mes plans truqués (à mort le rotoscoping !! Je déteste ça et j’en fais encore et encore pendant des heures... Vous disiez « masochisme » ?) et réaliser la post production sonore.
Un peu de pain sur la planche en somme…
(Photo : Morgane Image)